L’excès d’égoïsme
L’amour de soi est un instinct ancré en l’homme depuis l’aube de la création. C’est lui qui le pousse à l’activité permanente, le préserve de la mort, même quand il y aspire. C'est à cause de cet instinct que l’humanité sait identifier et fuir tout ce qui pourrait lui nuire, et découvrir les moyens d’assurer sa stabilité. Cette manifestation de l’esprit contribue alors grande ment au progrès de l’homme, à son perfectionnement; et la civilisation humaine en général lui est beaucoup redevable.
Mais le bonheur de l’homme n’est assuré que s’il se garde de tout excès dans ses penchants.
Par conséquent, pour satisfaire modérément cet amour de soi, et favoriser l’éclosion de toutes les qualités et de tous les dons moraux, il faut les soumettre au contrôle de la raison. Car c’est l’intelligence qui doit guider les hommes, et non leur instinct. L’intellect canalise les énergies vitales, les empêche de se rebeller, et d’outrepasser des limites sagement fixées.
La faculté intellectuelle qui a une fonction majeure dans l’édification de la personnalité rectifie tout débordement corrige notre perception des choses.
Quand l’égoïsme trouve le champ libre, il obstrue la perspicacité de l’esprit.
Celui qui est atteint de ce mal, n’en fait qu’à sa tête, se pervertit jusqu’à tomber dans le gouffre de la corruption et du malheur.
Ce que l’on reproche à l’amour- propre ne se rapporte en effet qu’à ses formes abusives et morbides qui échappent à l’ordre dicté par la raison.
Le degré de promotion des individus dépend directement de leur rang spirituel et moral. La plupart des vices moraux naissent de notre propre déséquilibre dans la satisfaction de nos penchants et de notre appréhension erronée et trop passionnelle des problèmes.
Les possibilités de l’homme sont réellement très vastes, et chacun a la base nécessaire pour obéir à ses sentiments rationnels authentiques.
Mais rien ne lui est plus important et plus lourd que de modérer ses sentiments et ses instincts, entre autres l’amour de soi.
Nous devons accorder une grande attention et consacrer la plupart de nos efforts à mettre la bride à cette faculté inhérente à notre âme. Car si nous la laissons à elle- même, si nous ne la conditionnons pas, nous échouerons dans toute entreprise de promotion morale.
Quel profit tirons-nous de la polémique?
La réussite morale et sociale est en relation directe avec des principes que nous devons connaître et auxquels nous devons nous conformer.
Les rapports de l’homme avec ses semblables, et la connaissance de ses limites et devoirs déterminent sa destinée, heureuse ou malheureuse.
L’attirance pour la vie en communauté et l’entre tien de rapports avec les autres sont innés en l’homme qui redoute la solitude et l’exil. Mais une coexistence saine et pacifique, avec les autres et avec sa propre conscience demeure impossible sans la paix intérieure, la réconciliation avec soi-même.
La coopération, l’entente et la paix servent de pilier à l’activité sociale, et le respect des droits et des sentiments d’autrui constitue la règle élémentaire du savoir vivre, et consolide les relations.
Ceux qui l’enfreignent, perdent naturellement de vue l’équilibre et la modération dans leurs rapports avec les hommes, et voient s’effriter autour d'eux les amitiés qu’ils ont liées avec délicatesse.
La controverse est condamnable, parce qu’elle blesse toujours gravement l’amour propre d’une des parties, et crée les dissensions. Le querelleur, porté à la contradiction, peut ignorer les causes de sa conduite mais, il doit néanmoins savoir que son amour de soi de mesuré est le facteur principal à l’origine de son caractère.
Pour assouvir son orgueil, l’obstiné trouve à redire, à critiquer à chaque fois que quelqu’un expose son opinion sur un sujet donné et croit prouver ainsi la supériorité de son opinion à lui-même en offensant son interlocuteur.
Des fois, pour dissimuler son obstination, il feint de ne pas comprendre et demande des éclaircissements, des explications à son vis à vis.
Il perd ainsi la sincérité dans ses jugements, et fera montre d’impudence et d’effronterie à l’égard des droits d’autrui.
Il va sans dire que la personne victime de ce mépris ne manquera pas de réagir pour défendre son honneur.
Elle saisira la première occasion qui se présentera pour réparer l’outrage. Un tel esprit pourrait corroder l’unité et la culture d’un peuple, et lui occasionner des dommages qu’il n’est pas facile de réparer.
Un savant a dit:
«La raison est une lumière qui éclaire la voie parmi les ténèbres de l’ignorance, et écarte les obstacles. Nous sommes toujours fier de connaître les causes des choses et d’en saisir les liens et relations à l’aide de notre intelligence. Mais malheur à nous si nous voulons découvrir une vérité par la dispute, le débat. La controverse n’apporte rien d’autre à l’esprit que l’agitation. Son seul résultat est que l’ignorance des deux querelleurs apparaît au grand jour. Elle ne pourra jamais changer les opinions et les croyances, ni encore moins faire triompher les unes sur les autres.»
L’opinion des leaders de l’Islam
L’Islam prend en compte, l’ensemble des aspects de la vie sociale, et envisage tous les facteurs de la cohésion et de l’affection. Il interdit et condamne sévèrement tout ce qui pourrait porter préjudice à l’unité et aux fondements de la puissance des musulmans.
Les chefs religieux ont enseigné à leurs adeptes comment se purifier le cœur de toutes les souillures.
Le Prophète- que le salut de Dieu soit sur lui et sur sa Famille- a dit:
«Il est de l’honneur de l’homme de prêter assidûment l’oreille à son frère quand il lui parle.»
L’Imam al-Baqer- que la paix soit sur lui- a dit:
«...Et apprends l’art d’écouter comme tu apprends l’art de parler, et ne coupe jamais la parole aux gens...»
Les Imams de la religion ont, en maints endroits et occasions blâmé la controverse et la polémique, en rappelant tout le mal qu’elles engendrent, au point qu’ils ont demandé à leurs disciples de renoncer à la querelle même quand il s’agit de défendre le droit, la vérité.
L’Imam Sadeq- que la paix soit sur lui- a dit:
«L’homme ne parachève la réalité de la foi que lorsqu’il renoncera à la dispute, même quand il a raison.»
Personne ne sort vainqueur d’une polémique, et d’une querelle. L’Imam al-Hadi- que la paix soit sur lui a dit:
«La dispute déracine même les amitiés les plus anciennes, et fait éclater les pactes les plus fermement établis.
Son moindre mal est de susciter un esprit de rivalité. Or la rivalité est cause même de la rupture des liens entre les hommes.»
Dans son livre: «Comment se faire des amis», Dale Carnégie fait l’observation suivante:
«Neuf fois sur dix, chacun des adversaires se retire du débat, plus que jamais fermement convaincu d’étre dans le vrai. Ces batailles-là, personne ne les gagne. En effet, si vous perdez... vous perdez! Et si vous gagnez... vous perdez aussi. Comment cela? Bon. Supposons que vous ayez remporté sur votre adversaire une victoire éclatante, que vous lui ayez prouvé qu’il était un ignorant. Et après? Vous vous frottez les mains de jubilation. Mais lui, que pense-t-il? Vous lui avez fait sentir son infériorité. Vous avez blessé son amour-propre, son orgueil. Il est furieux de votre triomphe.
Ce n’est pas en discutant qu’on arrive à convaincre. Les deux choses n’ont pas le plus lointain rapport entre elles. Ce n’est pas ainsi qu’on influence l’esprit humain.»
Le sage Franklin disait:
«A force de batailler et d’argumenter, vous parviendrez peut-être à confondre votre interlocuteur, mais votre victoire sera vaine, car jamais vous n’obtiendrez l’accord sincère de votre adversaire.»
Le Prophète de l’Islam- que la paix soit sur lui-:
«Délaissez la controverse, car elle est stérile, et n’apporte aucun bien, et déchaîne l’inimitié entre les frères.»
Le Dr. Avibury.
«La discussion ne rapporte pas grand-chose, et peut même donner lieu à des résultats contraires à ceux escomptés. Car les susceptibilités s’aiguisent au moment de la dispute, et le ton de la discussion, même respectable, aura un effet négatif sur l’un et l’autre des deux adversaires.
En outre, plus nous nous efforcerons de le vaincre, plus nous le pousserons à persister dans sa position. Dans pareil cas, une seule parole suffirait pour rompre à jamais les liens d’amitié entre les deux parties. D’autre part, nous ne pourrons jamais, par la discussion et la polémique, persuader les autres d’opter pour nos idées.»
Le polémiste ne connaît pas de tranquillité et ne se sent pas en sécurité, comme si quelque chose de mystérieux trouble son esprit.
A ce sujet, l’Imam Sadeq- que la paix soit sur lui- a dit:
«Gardez-vous de la dispute; elle enflamme les cœurs et cause l’inimitié, et suscite les rancunes.»
Ainsi en se conformant aux enseignements sublimes de l’Islam, nous pouvons frayer la voie à une véritable transformation de soi, de nos qualités et caractères, nous rendant aptes au service sincère de l’humanité.