LE ROLE DE LA RAISON DANS L'IJTIHAD
  • Titre: LE ROLE DE LA RAISON DANS L'IJTIHAD
  • écrivain: Allama Murtada Mutahhari
  • Source:
  • Date de sortie: 18:32:54 2-10-1403

Allama Murtada Mutahhari


Le sujet que allons traiter dans cette étude fait partie des sujets controversés au sein des écoles de jurisprudence et des théologiens (mutaqallimuns), tout comme le sont les notions de justice divine et du rôle de la raison dans l'établissement des jugements moraux et légaux, l'utilisation de l'analogie (qiyas) ou celle de l'Ijtihad par l'opinion (ijtihad bir-ra'y).

Certaines écoles de jurisprudence, qui ont adopté le qiyas, comme l'école hanafite, souscrivent au rôle de la raison dans l'ijtihad qui, selon leur interprétation, prend la forme du qiyas et de l'ijtihad, bir-ra'y tandis que les autres écoles, opposées au qiyas, comme l'école zâhirite, ne sont pas d'abord pour attribuer un rôle à la raison, ni sous la forme du qiyas ni sous une autre.

De ce fait, le premier groupe, en énumérant les sources de la législation, maintient qu'elles sont au nombre de quatre : le Coran, la Sunna, l'Ijma (le consensus) et l'Ijtihad ou qiyas, tandis que le second groupe ne va pas au-delà du Coran, de la Sunna et à la limite, de l'Ijma.

Mutazilites et Ascharites


Parmi les théologiens, les Mutazilites prônent le rôle indépendant de la raison, ils croient en la justice divine et dans le fondement rationnel des jugements moraux et légaux. Ils croient aussi que le monde de la genèse est établi sur des fondements de justice, le présent étant le meilleur possible. Ils donnent même une explication au problème de la malveillance dans le monde et croient que dans le monde de l'au-delà, le châtiment et la récompense seront accordés en fonction du critère inaltérable de la justice qui est appréhendé par la raison. Pour eux, il n'est pas possible que Dieu souhaite quelque chose qui ne soit pas en accord ces critères rationnels et définis.

Sur le plan de la législation. Ils croient également que les commandements divins furent promulgués en fonction de critère de justice et avec une attention portée sur les vrais bénéfices et les préjudices liés à l'obéissance ou à la désobéissance aux lois. Selon la doctrine mutazilite, tout acte divin, qu'il appartienne au monde de la genèse ou de la législation, répond à un but et une intention.

Par contre, les Ascharites n'admettent aucune de ces notions. Ils ne reconnaissent ni celle de la justice divine. Ni celle de la base rationnelle des jugements moraux et légaux. Ils ne croient pas non plus que le monde soit basé sur le principe de justice ou que le monde de la genèse soit le meilleur possible. Selon eux, les affaires du monde de l'au-delà ne seront pas non plus décidées d'après le critère de justice, de même que les lois divines n'ont pas été érigées pour assurer une série de bénéfices et pour éviter les préjudices. Ils refusent de prendre en considération que les actes divins ont une intention et un but. Pour les Acharites, croire en la justice divine, en la base rationnelle des jugements moraux et légaux et dire que les actes divins sont soumis à des buts et intentions, qu'ils sont utiles ou préjudiciables, contrediraient le principe de l'Unité (Tawhid) et l'idée de liberté absolue de Dieu. Aucun principe ne peuvent être érigés en critères de Son désir, car ce faisant, on Lui imposerait des limites.

Pour eux, la volonté divine n'est ni subornée à un quelconque critère ni dépendante de lois et de principes. Au contraire, lois et principes sont soumis et dépendant de Sa volonté. On ne peut compter manière définitive, que telle ou telle ou telle chose est accord ou non avec la justice. Par exemple, on ne peut affirmer d'une manière certaine que les gens qui obéissent à Dieu seront envoyés au Paradis et ceux qui pèchent en enfer. Sa Volonté et Ses actes ne peuvent être restreints par aucune règle. Ils interprètent le verset : ''Il n'est pas interrogé sur ce qu'Il fait ; mais eux (Lui) rendront compte (de leurs acte)'' (Al-Anbiya ; 21 :23) Pour dire que nous n'avons pas le droit de demander le " pourquoi " ni la signification de Ses actes. Aucun critère ne peut justifier la question à propos des Actes de Dieu ou de Sa tolérance. Les Ascharites font formellement objection à la formulation " les cieux sont érigés sur des fondements de justice ". Ils font remarquer que les questions telles que la souffrance et la maladie, la création de Satan, l'injustice sociale et l'inégalité, les différences de classe, L'hégémonie de l'arrogance et de la corruption dans le monde sont des phénomènes décelables par la raison mais qu'ils n'auraient pas existé si l'ordre de l'univers avait été basé sur la justice. Concernant les lois et les préceptes religieux, ils ont formellement déclaré qu'ils ne sont pas basés sur une quelconque sagesse ou prudence.

Ils ajoutent que les lois de la Shari'a engendrent à la fois des disparités et des similitudes distinctes. Plusieurs questions, bien que différentes, sont soumises au même jugement alors que plusieurs autres questions, en dépit de leur similitude et de leur ressemblance, sont soumises à des jugements différents. Ils ont cité de nombreux exemples pour étayez leurs assertions. Quoiqu'il en soit, selon la doctrine ascharites, le processus de la genèse n'est pas soumis au principe de justice, au contraire, c'est la justice qui lui est subordonnée. Dans le même sens les lois de la Shari'a ne sont pas non plus soumises à un quelconque fondement réel de bénéfices et des préjudices, mais plutôt le bénéfice et le préjudice, le bon et le mauvais sont asservis aux disposition de la Shari'a. Donc, si nous devons parler de la justice et de l'injustice, du vrai et du faux, du bénéfique du préjudiciable, nous devons signifier que ce que Dieu fait est juste, bon et bénéfique et non pas que Dieu fait ce qui est juste, bon et bénéfique.

Ce genre de réflexion n'est pas sans rappeler la tendance qui existait parmi les penseurs Grecs et les Sophistes 2500 ans auparavant, à propos de la réalité et du rôle de la pensée et des idées de l'être humain. Ces derniers ont cherché à savoir si la réalité existe indépendamment de nos esprits et de nos idées ou bien si " rien n'existe à l'exception de ce que de nous perçoit et connaît". Pour eux "…ce sont nos propres sentiments et convictions qui mesurent ou déterminent les limites et la nature de la réalité qui n'existe que par rapport à eux et qui est différente pour chacun d'entre nous". La vérité et la réalité seraient-elles relatives et subjectives?

Ce qu'un groupe de théologiens musulmans avait avancé à propos de la religion, dans sa relation avec la vérité, la bonté, la justice et le bien avait été dit par les Sophistes grecs à propos de l'esprit et sa relation avec la réalité et la vérité. Les arguments présentés par les Sophistes pour prouver leur énoncé ressemblent à ceux avancés par ce groupe de théologiens. Du fait de cette similitude, il serait juste de les appeler les sophistes musulmans.

Ce groupe de théologiens croyait avoir découvert dans les lois islamiques de multiples contradictions, un traitement égal pour des choses disparates et un traitement différent pour des choses similaires. Ils ont soutenu de ce fait, que le bénéfice et le préjudice ne pouvaient être le critère des lois religieuses. Inversant les données, ils ont affirmé que les lois religieuses sont le critère du bon et du mauvais, du bénéfique et du préjudiciable.

Les Sophistes ont également pris prétexte des contradictions et des erreurs de la raison et de la perception pour affirmer que la réalité est dépendante de notre connaissance ou de nos opinions. La réponse donné par les philosophes aux sophistes grecs et non grecs est également similaire à celle donnée par les "Adites (ceux qui croient en la justice divine) à ce groupe de théologiens. De plus, la nation du taswib (ratification) avancée par ce groupe de théologiens est semblable en tous points à la théorie du relativisme. Selon cette théorie, ce qu'un individu peut percevoir comme étant la vérité peut ne pas l'être pour un autre. Ainsi, d'après l'idée du taswib, ce qu'un mujtahid peut déduire comme étant juste, autant qu'il est lui-même concerné, peut ne pas l'être pour les autres.

Prédestination ou liberté


Beaucoup de problèmes, qui sont d'une profonde signification théorique ne sont pas, sur le plan pratique, si importants. Par contre, beaucoup de problèmes qui ne paraissent pas très importants sur le plan théorique sont d'une immense signification sur le plan pratique. Par exemple, en théologie, le problème des attributs divins est d'une grande importance aussi loin que la théorie est concernée, mais elle présente peu d'utilité pratique. Aussi, savoir si les attributs de Dieu sont ou non identique à Son Essence peut être un important sujet d'étude théorique, mais cela a peu de conséquence sur le plan pratique, quelle que soit l'opinion choisie, et n'a pas d'influence sur la vie ou la foi d'une société musulmane. Quant au problème de la prédestination et de la liberté (al-Jabr wat-Tafwid), il a autant d'importance sur le plan théorique que dans ses aspects pratiques. Car la croyance dans le déterminisme et le fatalisme, dans la négation de toute forme de liberté humaine détruisent le moteur de l'action et tuent toute sorte de dynamisme.

Le problème de la justice divine et la croyance dans les fondements rationnels des jugements moraux et égaux occupent la place la plus importante dans la pensée islamique, à cause de sa grande influence sur l'histoire scientifique et intellectuelle ainsi que sur la foi des Musulmans. C'est un fait que ceux qui ont discuté et étudié cette question sont très vite arrivés à la croisée des chemins. Les uns, en partant du principe que les lois religieuses étaient basées sur une réalité perçue par la raison, essayèrent de découvrir aussi loin que possible ces bases rationnelles. Puisqu'ils reconnaissaient un objet et un sens à la religion, ils tentèrent de les trouver et érigèrent la raison en preuve interne. Ils finirent par accepter les jugements définitifs de la raison comme jouissant de l'approbation du Législateur Divin; les autres, en considérant que l'objet de la Shari'ah résidait dans une simple obligation et la pratique d'actes d'absolue servilité, ont affirmé qu'elle était de l'Ijtihad et de l'interrogation intellectuelle.

Combien il importe que nous concevions la religion de telle ou telle manière! En effet, la différence est grande entre le fait de la concevoir en termes de formes externes, où tout changement des formes extérieures et des apparences est perçu comme un changement de l'essence et du contenu et où l'on imagine une sorte de correspondance inhérente entre ces formes et l'esprit même de la religion, et le fait de considérer que les lois universelles de l'Islam, qui couvrent de larges aspects sociaux et éthiques de l'humanité, sont basées sur des réalités concernant la pureté spirituelle, le bien-être et les droits innés des humains. Pouvons-nous nier l'existence de ces réalité et croire, par exemple, que les vices tels la jalousie, le mensonge, la suspicion sont mauvais parce qu'ils ont été interdits par le Législateur, ou que les vertus telles que la véracité, l'honnêteté et la bienfaisance sont bonnes car elles furent commandées par Lui, comme s'il ne pouvait pas y avoir de différence entre eux en réalité? Il en est de même concernant les droits humains. Doivent-ils être reconnus car ils sont pris en compte par le Législateur ou parce qu'ils sont déterminés d'une manière en tant que droits légaux? La justice et l'oppression sont-elles également définies à la lumière des commandements divins? Si d'autres normes avaient été ordonnées, la justice et l'injustice auraient-elles été définies autrement?

LA POSITION SHI'ITE


Les deux questions intellectuelles mentionnées plus haut (le qiyas le fondement rationnel des jugements) ont été discutées du point de vue de la jurisprudence sunnite et de la théologie. Il est nécessaire à présent de les étudier également du point de vue chi'ite. La réflexion chi'ite précoce concernant la première est extrêmement délicate, voire même intéressante. Au regard du problème de sa légitimité ou non, le shiisme a rejeté le qiyas sur la base des textes et des énoncés de leurs Imams infaillibles (as). Le shiisme désapprouve le qiyas pour deux raisons:

Tout d'abord, lorsque les autres ont justifié son utilisation en expliquant que les problèmes à résoudre sont illimités mais que les règles de la charia sont limitées, ce qui les obligeait à y recourir, les Shiites refusèrent cette explication car, dirent-ils, il n'est pas nécessaire que tout événement ou tout problème ait une règle particulière. Les règles générales applicables à toutes les situations sont formulées dans la Shari'a. La seule chose dont on a besoin est un ijtihad compétent soit, en d'autres termes, d'une recherche et d'une réflexion pour faire dériver le particulier du général. Plusieurs hadiths rapportés des Imam (as) dans les compilations de hadiths, comme Al-Kafi, utilisent le même moyen.

Deuxièmement, le qiyas est une opération de l'esprit basée sur la conjecture, l'hypothèse et les similitudes superficielles, et de plus, il apparaît comme une ingérence de la raison dans des tas de question inintelligibles. A certains moments, nous pouvons être concernés par le cours d'une action où la raison saisit un fait avec certitude et clarté. Mais à d'autres moments, dans les cas où la question est incompréhensible à la raison, est-il justifié de suivre la conjecture et l'hypothèse? Il y a bien évidemment une grande différence entre les deux sortes de situation, mais si les fondements de la religion doivent être basés sur l'opinion, l'analogie, l'hypothèse et la supposition, elle ne pourra survivre. C'est la position défendue par les Shiites concernant la première question.

Ajoutons cependant que le rejet du qiyas par les chiites ne peut être assimilé à celui de ses autres adversaires qui le rejetaient car ils ne croyaient pas dans le fondement rationnel des lois religieuses et avaient adopté une position hostile envers le principe de la justice divine. Mais les raisons avancées par les Shiites sont différentes. En dépit de leur forte désapprobation du qiyas, ils affirment avec toute la conviction possible le rôle de la raison dans l'ijtihad. Les juristes shiites et les fondamentalistes (usuliyyun) ont officiellement reconnu la raison comme l'une des quatre sources de la jurisprudence, tout comme les théologiens shiites ont très tôt adopté la doctrine de la justice, s'appuyant sur l'affirmation :

" La justice et l'Unicité sont fondamentales "


C'est là que se situe la position extrêmement délicate des shiites. Ils acceptent d'une part le rôle de la raison et d'autre part, rejettent l'analogie (qiyas) et l'opinion (ray) qu'ils considèrent basés sur l'hypothèse et la conjecture. En fait, avec le plus grand discernement, ils suivent la vraie voie du Coran, qui approuve avec éloquence l'usage de la raison et désapprouve l'hypothèse et la conjecture, les jugeant invalides.

Les Shiites ont occupé une position très sensible entre la droite te la gauche, une légère déviation de la voie du milieu était suffisante pour les exposer soit au danger de l'analogie ou à celui de l'obscurantisme servile et du formalisme stagnant.

Toutefois ; au cours des dernières années, lorsque la balance pencha en faveur des Ascharites, même les Hanafites qui se tenaient au point le plus éloigné de cette doctrine, se mirent à s'en rapprocher. Combien de temps les Shiites pouvaient-ils s'accrocher à cette voie du milieu, sans dévier, que ce voit vers l'extrême de l'analogie ou vers un formalisme stagnant ? Il s'agit d'une question qui mérite d'être étudiée dans ses détails scientifiques et historiques. Nous pouvons ici faire simplement deux brèves remarques à ce sujet :

Tout d'abord au cours de l'histoire intellectuelle de l'Islam, l'ensemble des sectes et des groupes se sont mutuellement influencés les uns les autres. Les Adlites furent influencés par les idées des non Adlites et vice-versa. Ce brassage d'idées était général et bien naturellement, les Shiites ne pouvaient rester à l'écart de celui-ci.

Ensuite, si nous examinons les œuvres des savants shiites, nous trouvons la sensibilité hostile au qiyas des première temps d'emporter tout droit jusqu'à l'heure actuelle. Il est difficile de trouver un seul savant, par les juristes shiites, qui ait affiché une tendance favorable au qiyas, et si certains savants semblent s'en être approchés, ils appartiennent plutôt à une époque lointaine et non à des périodes plus récentes. Donc, il y a une certitude complète quant à l'absence de déviation envers cet extrême.

Trouver les fondements rationnels des lois


Toutefois, la déviation envers l'autre extrême ne peut être totalement exclue. Ceux qui sont au courant savent bien que les termes Adlites et non Adlites ont uniquement des implications rituelles dans le vocabulaire des savants. Car si le chemin pavé par les lites dans le passé avait été réellement suivi, il aurait favorisé l'éclosion de plusieurs sciences sociales chez les Musulmans, ces sciences dont l'origine fut découverte progressivement par les Européens un millier d'année plus tard.

L'intérêt porté par les Européens aux nations de vérité et de justice, en tant que réalité indépendantes, a permis d'une part le développement des sciences sociales, politiques et économiques, des disciplines scientifiques et juridiques et ont servi d'autre part, de moteurs pour l'éveil des nations, infusant en elles le sentiment de la dignité.

Les Musulmans ne peuvent continuer à suivre ce chemin et reconnaître que la source et l'origine des droits humains sont inhérents à la nature car ils n'ont pas réussi à découvrir les principes sociale de l'Islam, ils ne réussirent pas non plus à les transmettre ni à les expliquer aux autres, tout comme ils ne surent pas les utiliser comme base générale pour la déduction des lois de la Shari'a.

Selon l'opinion des spécialistes, le système légal musulman est le système le plus achevé du monde et l'un des plus fameux. Alors qu'à l'Est, une grande importance fut accordée à l'éthique au détriment de la loi, l'Ouest a accordé une plus grande importance à la loi. L'Islam s'est distingué des deux conceptions en accordant la même importance à la loi et l'éthique. Mais les Musulmans, pour différentes raisons, ont accordé plus d'importance à l'éthique et ont négligé le système légal islamique.

La connaissance, clé de la religion


Il est possible que la discussion engagée ci-dessus, à propos du rôle de la raison et de la justice puisse être mal interprétée et nous faire dire que, puisque les lois islamiques sont basées sur les intérêts de l'individu et de la société, il est bon de se laisser aller à la spéculation pour essayer de trouver une quelconque philosophie postérieure aux lois et aux rituels islamique et d'évoquer les intentions d'actes divers comme par exemple le tayammum ( la purification rituelle au moyen de sable), le ghusl (le bain), le madmada (le lavement de la bouche) ou bien l'instinchaq (l'aspiration de l'eau par le nez au cours du wudu) ou de s'en abstenir tant que leur justification rationnelle n'a pas été trouvée. Je dois clarifier que ceci n'est pas mon propos. Ce que je souhaite expliquer, c'est que les lois et les préceptes de l'Islam, tant qu'ils concernent les droits civils, les questions pénales, les relations sociale ou d'autres aspects du même ordre, sont basés sur une série de vérités et de faits. Si nous parvenons à la connaissance de ces faits par une méthode scientifique appropriée, dont les principes ont été successivement découverts dans notre monde aujourd'hui, nous serons en mesure de comprendre la signification et le raisonnement qui sous-tendent les lois islamique qui nous furent révélées par la meilleure des voies.

Par exemple, le saint Coran et les enseignements d'illustres hommes pieux nous ont transmis es préceptes et des règles éthiques d'une remarquable acuité. Ces paroles et ces injonctions ont toujours été accessibles à tous. Mais est-il possible à présent, ou bien était-il possible dans le passé, de les analyser et de comprendre parfaitement leur objet et leur réalité sans risque d'égarement ? A moins qu'une personne n'ait une connaissance complète des fondements scientifiques de l'éthique et de la psychologie, il ne lui est pas possible de saisir l'essence de ces paroles de sages qui paraissent simples à première vue. La valeur réelle et la sublimité des paroles célestes ne deviennent claires que si quelqu'un examine les différents systèmes éthiques du monde, en recherchant leurs buts et leurs principes, qui peuvent parfois être divergents.

Prenons un autre exemple. Dans le saint Coran aussi bien que dans les paroles du prophète (saw) et des Imams infaillibles (as), nous trouvons un grand nombre de discours concernant l'Unicité, les Attributs et les Noms divins. Ceux qui ont passé leur vie à étudier la notion d'Unicité et la théologie savent qu'ils rencontrent parfois des formulations dans le Coran et dans le Nahj al-Balagha qui renferment plusieurs sens sous-jacents, alors que ces mêmes expressions et déclaration conduisent les gens des hadiths, les Hanbalites et les Zâhirites à l'anthropomorphisme ou l'hérésie. Pourquoi ? Parce que toute parcelle de la révélation, en dépit de sa simplicité et de son utilité universelle, est un extrait de la réalité qui ne pourrait être saisie et comprise que par la science.

Au cours du dernier pèlerinage, alors qu'il encourageait les gens à mémoriser, à préserver tout ce qu'ils entendaient de lui et à les transmettre aux générations futures, le prophète (saw) a dit :

" Combien de fois l'un a-t-il transmis le savoir à un autre qui était plus savant que lui ? ". Celui qui entend les hadiths peut avoir une plus grande capacité à comprendre et à analyser que le narrateur lui-même. Il peut mieux comprendre l'essence, le propos et les sens d'un récit à cause de sa supériorité en matière de savoir. La religion peut être mieux assimilée à la lumière de la connaissance. Le secret de la grandeur et du caractère miraculeux de la sainte religion de l'Islam réside dans l'immense étendue de ses enseignements. Si un quelque aspect de la nature s'éclaire par l'apport de la science, non seulement il ne rend pas l'enseignement de l'Islam désuet, mais il le rend plus brillant et plus évident encore.

Dans le domaine du spirituel et du mysticisme, ceux qui ont exactement saisi le sens caché des traités relatifs à ce sujet ont été ceux qui ont une familiarité avec ce domaine. Ibn Abi Hadid dit que l'essentiel de tout ce que les mystiques ont dit peut être retrouvé dans quelques phrases du sermon de l'Imam Ali (as) qui commence par "Il a vivifié la raison"…

En résumé, la connaissance est la clé de la religion. L'étendue des enseignements et des lois islamiques couvre tous les aspects de la vie humaine. Les bénéfices de la générosité de la révélation divines seront d'autant plus importants que l'on parviendra à connaître les aspects profonds de la vie humaine et des principes scientifiques qui y sont afférents. Si seule la connaissance de la langue arabe avait été suffisante pour comprendre la religion, tout Arabe aurait été capable de tirer autant de bénéfices de ces enseignements qu'un philosophe.

Les droits humains sont-ils naturels et immuables ?


Par ailleurs les fondements des droits humains ne forment pas une exception à cette règle générale. Comme l'éthique et la théologie, ces droits sont également basés sur une série de vérités naturelles. Plus nous sommes instruits à propos de ces vérités et principes fondamentaux, mieux nous pouvons comprendre le but et le propos de la religion. Si nous connaissons ces principes et fondement, nous pourrons peut-être reconnaître plusieurs des versets du Coran et des traditions se référant aux jugements qui avaient été jusqu'ici considérés comme n'ayant aucune signification légale.

Ainsi notre but est non pas de prôner la spéculation pure ou de philosopher à propos des lois et des préceptes musulmans. Notre propos consiste à indiquer que, puisque les enseignements de l'Islam couvrent tous les domaines de la vie humaine, et que sur la base de notre croyance en la justice divine, nous savons que ces enseignements ne sont ni extravagants ni dénués de fondements, mais au contraire, basés sur la vérité et les réalités naturelles à partir desquelles ils tirent leur substance, nous serons plus capables de comprendre le sens et les propos du langage de la révélation, comme nous l'avons vu dans les domaines de l'éthique et de la théologie, si nous venons à connaître de près ces réalités, qui furent systématiquement étudiées au cours de plusieurs siècles avant de prendre la forme de disciplines scientifiques.

En Islam, les lois relatives à l'économie, à la société, au gouvernement et à la politique sont considérées actuellement comme étant des lois inaltérables et fixes. Alors, comment quelqu'un peut-il sans l'étude de celles-ci, affirmer avoir parfaitement compris les propos et les affirmations du Coran concernant les questions auxquelles elles se réfèrent, et les présenter au monde comme le plus sublime des enseignements en matière d'organisations sociales ? Si l'on veut admettre qu'une personne ordinaire ignorant tout à propos de la sagesse divine, peut comprendre les versets et les traditions relatifs au concept de l'Unicité ainsi que d'autres concepts théologiques, aussi bien qu'un philosophe qui a assidûment travaillé et assimilé les bases de la philosophie, on admettra aussi que toute personne ignorante des sciences pourra comprendre les affirmations et les propos de l'Islam concernant les différents problèmes sociaux, aussi parfaitement que le savant qui les étudiés.

L'"Islam selon le texte fondamental du Coran, la religion de la nature. Lorsque nous entendons des scientifiques et chercheurs affirmer que les droits humains sont naturels et innés, donc permanents et fixes, généraux et universels, et qu'ils sont prioritaire à tous les autres droits positifs, n'est-il pas nécessaire de mener une recherche à ce propos, pour examiner si cela est vrai? Si tel est le cas, il est évident que l'Islam les reconnaît absolument. Est-il vrai que des notions telles que la liberté de l'individu, l'égalité, le droit à la propriété privée et à l'appropriation, la liberté de croyance et d'expression sont enracinées dans la nature humaine ? Est-il vrai que ce sont des lois prescrites par la nature elle-même et que leur connaissance constitue de base pour le développement de toutes les sociétés et l'équilibre des relations humaines ?

Les droits humains précèdent-ils l'existence sociale ? L'individu les possède-t-il antérieurement à son existence sociale ? L'existence sociale signifie-t-elle que chaque individu participe à la société avec le capital de ses droits antérieures et essentiels, en s'associant avec d'autres individu ? Ou bien ces droits sont-ils postérieurs à l'existence sociale, celle-ci étant la source et l'origine des droits individuels ? Ou bien peut ont, considérer que l'individu, en tant que tel, n'a aucun droit et qu'il n'a que des devoirs et des responsabilités, les droits étant uniquement ceux de la société, comme certains l'ont affirmé?

Sur quelle base déterminer les droits humains ? Sont-ce les intérêts des individus ou bien ceux de la société ? Jusqu'à quelle mesure est-il nécessaire de protéger les droits de l'individu ? La limite de la protection de ces droits est-elle le point où ils entrent en conflit avec les droits des autres individus, ou bien cette limite est-elle fixée lorsque les droits de l'individu entrent en conflit avec les intérêts de la société ? Ces questions et des centaines d'autres nous interpellent, et précisément, nous avons des lignes directrices dans les enseignements de l'Islam qui nous aident à trouver les réponses. Si ces lignes directrices avaient été compilées et présentées sous une forme scientifique, an aurait pu démontrer leur grande valeur et surmonter plusieurs des impasses actuelles.

Ainsi, en mettant l'accent sur la part de la raison, nous n'avons voulu ni revenir à la pratique du qiyas ou de l'opinion, considérées autrefois comme des innovations, ni nous engager dans la spéculation, devenue aujourd'hui une habitude. Notre but était d'inciter à l'étude scientifique des problèmes que l'Islam a largement abordés et dont les ressources et les potentialités de leur résolution nous ont été prouvées, à intervalles réguliers, au cours des derniers quatorze siècles.