L’éloquence dans le Noble Coran
  • Titre: L’éloquence dans le Noble Coran
  • écrivain: quran.al-shia.org
  • Source:
  • Date de sortie: 8:41:56 4-9-1403

Lorsqu’on parle de l’inimitabilité du Coran et de son éloquence, force est de traiter de la précision des mots ou la précision des expressions coraniques. La parole de Dieu - Exalté soit-Il - doit nécessairement être extrêmement précise de telle sorte qu’elle véhicule son message entièrement sans qu’il n’y ait une lettre dénuée de sens ni un mot redondant.


Marchez dans la terre

 

En vérité, l’inimitabilité du Coran tient parfois à une seule lettre (arabe : harf).[1] Allah - Glorifié soit-Il - dit : "Dis,marchez dans la terre" (en arabe : qul sîrû fil-ard) [2]. Là, tu t’arrêtes devant ce verset et tu demandes : "Pourquoi Dieu n’a-t-il pas dit : ’Dis marchez sur la terre’. Est-ce que je marche dans la terre ou sur terre ?" Conformément au sens commun, on marche sur terre mais on note que Dieu a utilisé la préposition "dans" (en arabe : fî) et non pas "sur" (en arabe : `alâ) : "Dis, marchez dans la terre". En effet, la préposition "dans" implique une relation circonstancielle. Le sens en est plus vaste car la terre devient la circonstance de l’action de marcher. De ce fait, la formulation est admissible. Mais, en matière de Coran, il n’y a pas de place pour ce qui est admissible. La formulation traduit précisément le sens voulu et le choix d’une préposition, plutôt qu’une autre, change le sens et est fait à dessein. Quelle est donc la sagesse qui réside dans l’usage de la préposition "dans" au lieu de "sur" ?

 

Lorsque la science a progressé et que Dieu a révélé les secrets de la terre et de l’univers, nous avons appris que la terre ne se limitait pas à sa dimension matérielle uniquement mais que ce concept englobait aussi l’atmosphère. En effet, l’atmosphère est une partie intégrante de la terre qui se meut avec elle et ne s’en sépare pas et est nécessaire pour la vie en son sein. Sans l’atmosphère, la vie devient impossible. Par ailleurs, les habitants de la terre se servent des propriétés que Dieu a données à l’atmosphère dans leurs découvertes scientifiques. Ainsi, quand tu prends l’avion, et qu’il t’emmène à dix mille mètres de la surface de la terre, tu ne dis pas que tu as quitté la terre. Tu dis plutôt que tu y voles. Quand quittes-tu la terre réellement et scientifiquement parlant ? C’est quand tu sors de l’atmosphère terrestre. Tant que tu y es encore, tu es dans la terre et non en dehors d’elle. L’atmosphère prolonge donc la terre ; elle en est une partie intégrante et tourne avec elle.

 

Revenons au noble verset et demandons-nous pourquoi Dieu - Glorifié soit-Il - a utilisé la préposition "dans" au lieu de "sur". La réponse est qu’en réalité tu marches dans la terre et non sur la terre. Il s’agit d’une réalité scientifique dont on n’était pas conscient à l’époque de la révélation du Coran. Mais, étant donné que c’est Dieu Qui parle et c’est Lui le Créateur, Il connait les secrets de Sa création. Il sait que l’homme marche dans la terre et à sa surface mais qu’il ne marche pas sur elle. Il y marche entre l’atmosphère terrestre et la surface de la terre. Il marche donc dans la terre, c’est-à-dire en son sein, entre l’atmosphère qui en est une partie intégrante et la lithosphère qui en est une autre partie. Nous notons ainsi la précision de l’expression coranique à l’échelle d’une seule préposition. Nous notons également que l’inimitabilité du Coran tient à une seule préposition.


Deux sortes de patience

 

Passons maintenant à un autre exemple susceptible de nous faire apprécier l’éloquence du Coran caractérisée par le choix des termes les plus justes pour exprimer le sens voulu, sans excès ni redondance. Dieu - Exalté soit-Il - dit par l’intermédiaire de Luqman conseillant son fils : wasbir `alâ mâ asâbaka inna dhâlika min `azm il-umûr ("[...] et endure ce qui t’arrive. Cela fait partie des bonnes dispositions et de la résolution dans les affaires.") [ 3] Puis, dans un autre verset, on lit : wa laman sabara wa ghafara inna dhâlika min `azm il-umûr ("Et celui qui endure et pardonne, cela en vérité, fait partie des bonnes dispositions et de la résolution dans les affaires.") [4]

 

Dans ce dernier verset, il y a la lettre lâm en plus (dans laman). Tout un chacun dirait que l’adjonction de ce lâm sert à insister sur le sens (restitué dans la traduction par l’expression "en vérité") et c’est là tout son apport. Peu de gens s’y arrêteraient, mais lorsque le musulman scrute les sens véhiculés par le Noble Coran, il constate que chaque lettre y a été placée avec une extrême sagesse et que rien ne s’y trouve gratuitement. Chaque terme exprime un sens précis qu’aucun autre terme ne peut restituer, malgré les similitudes.

 

Si nous examinons de plus près l’exemple ci-dessus, il s’avère que dans le premier verset, Allah - Exalté soit-Il - dit : "et endure ce qui t’arrive". Ce qui arrive à l’un de nous tombe dans l’une de deux catégories : les choses où l’individu a un antagoniste et les choses où il n’y a aucun antagoniste ni adversaire. Typiquement, lorsque je tombe malade, je n’ai pas d’adversaire. Lorsqu’il m’arrive un mal prédestiné comme, par exemple, un objet qui tombe sur moi pendant que je marche dans la rue, je n’ai pas d’adversaire. Mais lorsqu’une personne m’agresse dans la rue, j’ai un antagoniste.

 

De même, il y a deux sortes de patience. D’abord, il y a la patience face aux événements fâcheux où aucun antagoniste n’est parti prenante, et ceci est relativement facile dans la mesure où il n’y a personne sur qui je peux déverser ma colère. Je ne peux alors revenir sur ce qui m’est arrivé et je ne peux que patienter face à mon destin. Ce genre de patience ne mobilise pas beaucoup d’énergie du fait de l’absence d’un antagoniste à qui je pourrais rendre la pareille.

 

La deuxième sorte de patience nécessite un effort plus grand et une volonté forte. J’y suis opposé, en effet, à un adversaire dont je peux me venger, tout comme je peux lui pardonner.

 

Aussi lorsque Dieu - Exalté soit-Il - parle des deux sortes de patience, Il exprime dans chaque cas ce que cela implique précisément comme sentiments humains. Quand Il parle d’une chose ne mettant pas en jeu un antagoniste, Il dit : "[...] et endure ce qui t’arrive. Cela fait partie des bonnes dispositions et de la résolution dans les affaires." Puis, lorsqu’il s’agit de la patience face à un antagoniste dont je pourrais me venger et, si je ne me vengeais pas, cela m’irriterait, le Très-Haut dit : ""[...] cela, en vérité, fait partie des bonnes dispositions et de la résolution dans les affaires." On insiste donc dans ce dernier cas sur l’effort assidu et la maîtrise de soi dont on doit faire preuve. Et comme ce cas fait intervenir un antagoniste dont on pourrait se venger, le Très-Haut dit : "Et celui qui endure et pardonne", renvoyant au pardon envers l’adversaire. La lettre lâm vient donc faire la différence entre "la résolution dans les affaires" dans le premier cas et dans le second. Ainsi donc une seule lettre dans le Coran produit-elle des miracles.


L’interpellation des facultés humaines

 

Cependant, l’inimitabilité ne se résume pas en une lettre seulement. Elle se caractérise également dans l’interpellation coranique des facultés humaines enfouies, ce qui traduit une connaissance parfaite des plus fins détails de la psychologie de l’homme et de ses facultés cachées.

 

Par exemple, lorsque Dieu - Exalté soit-Il - décida d’interdire aux polythéistes d’effectuer des circumambulations autour de la Maison Sacrée, quelle faculté du musulman est sollicitée à l’écoute de ce commandement ? Il s’agit de son sens de l’économie, dans la mesure où ces polythéistes venaient de toutes les contrées, de toutes les villes, et de tous les villages avoisinant la Mecque. Or, l’Islam n’était pas encore parvenu à ces régions. Leur interdire le séjour à la Mecque signifiait que l’on se priverait des richesses qu’ils dépensaient et des marchandises qu’ils apportaient en faveur de l’économie. Le sens de l’économie est donc interpellé par ce commandement.

 

Dieu - Exalté soit-Il - en tant que Créateur de l’âme humaine le sait parfaitement. La révélation de ce verset ne se limite pas à l’injonction en tant que telle, ni au tracé de la voie et l’indication d’une méthode de vie, mais elle fait place à la miséricorde de Dieu Qui s’adresse donc à la fibre économique de l’homme : "O vous qui croyez ! Les associateurs ne sont qu’impureté : qu’ils n’approchent plus de la Mosquée sacrée, après cette année-ci.[...]" [ 5] Puis, Il continue de s’adresser à la faculté économique de l’homme avant même que la question soit soulevée en ce qui concerne la baisse de revenus que cela engendrerait : "Et si vous redoutez une pénurie, Allah vous enrichira, s’Il veut, de par Sa grâce.", toujours dans le même verset. Cela est une mise en garde contre l’hésitation que susciterait la fibre économique et la crainte de la pénurie. Dieu Se suffit, en effet, à Lui-même et est Le Digne de louange, Il vous enrichira de par Sa grâce.

 

L’impact de la faculté économique sur l’âme humaine se répète souvent dans l’ici-bas. Lorsque Dieu - Exalté soit-Il - t’ordonne une chose ou te défend telle transaction, la question est immédiatement soulevée dans ton esprit : et le gain que j’en tire, comment le remplacer ? Là, Allah - Exalté soit-Il - affirme : "Je pourvoirai pour toi à Ma façon. Vu que la subsistance vient de Moi, Je te faciliterai une autre voie de subsistance. Ne crains guère la pauvreté et ne pense point que ta subsistance ira à quelqu’un d’autre."


C’est Lui Qui me nourrit et me donne à boire

 

Dans le Noble Coran, Dieu - Exalté et Glorifié soit-Il - S’adresse en permanence aux facultés humaines et leur répond avec une éloquence et une précision infinies, si bien que le changement d’un mot indique que Dieu - Exalté soit-Il - veut communiquer un sens nouveau ou faire comprendre une chose nouvelle. Cette précision phénoménale se trouve à maints endroits dans le Noble Coran.

 

Par exemple, Ibrahim - que la paix soit sur lui - dit (à propos des idoles et des dieux des païens) : fa’innahum `adwwun lî illâ rabba al-`âlamîn § alladhî khalaqanî fahuwa yahdîn "Ils sont tous pour moi des ennemis sauf le Seigneur de l’univers, § Qui m’a créé, et c’est Lui Qui me guide ;" [6] Nous nous demandons alors pourquoi Ibrahim - paix sur lui - n’a-t-il pas dit : "c’est Lui Qui m’a créé et c’est Lui Qui me guide" au lieu de "Qui m’a créé, et c’est Lui qui me guide". La raison est simplement qu’il n’y a nul besoin de le souligner concernant la création.

 

L’être humain a beau grandir, gagner en puissance et gouverner le monde, nul ne prétendra être en mesure de créer un homme, au risque de devoir prouver ses dires et échouer. Personne donc ne prétend être le créateur de l’homme et cela se passe de confirmation. Mais il y a des centaines de milliers d’individus qui affirment guider autrui. Certains d’entre eux ont apporté des méthodes allant dans le sens de la religion, et d’autres des méthodes aux antipodes de la religion. Toujours est-il qu’ils prétendent tous guider l’humanité. Chacun met en avant un système soumis à son bon vouloir et à ses passions et prétend guider l’humanité. D’où la nécessité de souligner que la guidée ne vient que de Dieu, que la vérité et la voie droite viennent de Lui uniquement.

 

Ainsi le pronom personnel (huwa) était-il nécessaire dans la deuxième moitié du verset alors que dans la première moitié il n’était pas utile de le rappeler. La création est en effet un attribut divin que personne ne dispute et ne demande pas de confirmation, alors que la guidée compte de nombreux prétendants et nécessite l’insistance par le mot huwa (traduit par "c’est Lui Qui").

 

On poursuit ensuite avec "et c’est Lui Qui me nourrit et me donne à boire" [7]. L’homme gagne en effet le prix de sa nourriture et de sa boisson. D’où de nombreux prétendants en termes de subsistance et la nécessité de souligner, de nouveau, que c’est Dieu - Exalté soit-Il - Qui l’octroie.

 

De même, il dit : "et quand je suis malade, c’est Lui Qui me guérit" [8] Entre le médecin et les médicaments, on pourrait en effet oublier la Volonté de Dieu - Exalté soit-Il.

 

Nous passons ensuite à : "et Qui me fera mourir, puis me redonnera la vie" [9] Il n’a pas dit : "et c’est Lui Qui me fera mourir, puis c’est Lui Qui me redonnera la vie" car ces questions appartiennent à Dieu de manière indiscutable. Il n’était donc pas indispensable de le souligner.

 

Dans ces versets, nous voyons ainsi que tantôt Dieu fait figurer le pronom huwa et tantôt Il l’omet selon le contexte et parce que la précision de l’expression coranique fait que les mots figurent à l’emplacement approprié pour exprimer un sens très précis. Ceci vaut pour l’emploi et l’omission des termes autant que pour le choix des mots en eux-mêmes.

 

Si Dieu - Exalté soit-Il - avait employé ou s’Il avait omis le pronom de manière indifférenciée dans ces versets, la plupart des gens ne s’y seraient pas arrêtés et on en traiterait comme d’une parole humaine. Mais, il s’agit là de la Parole de Dieu - Exalté et Glorifié soit-Il.


Nous pourvoyons pour vous / pour eux...

 

Passons maintenant à un autre point témoignant de l’éloquence du Noble Coran et de la précision de ses énoncés. Certains versets dans le Noble Coran, examinés de manière superficielle, semblent véhiculer le même sens. On s’interrogerait sur la raison pour laquelle Dieu - Exalté soit-Il - a substitué un vocable à un autre. Un examen plus attentif du Noble Coran conclut que le choix des mots n’est pas le fruit du hasard, et qu’il s’agit là d’un choix minutieux des termes.

 

Illustrons notre propos par la question de l’enterrement des jeunes filles de leur vivant du temps de la jâhiliyyah [10]. L’islam vint interdire cette pratique. A cette fin, Dieu - Exalté soit-Il - dit : Et ne tuez point vos enfants par pauvreté : Nous pourvoyons pour vous et pour eux. [11] On traite ici de la pauvreté et du meurtre des enfants. On trouve ensuite ce second verset : Et ne tuez point vos enfants par crainte de pauvreté, Nous pourvoyons pour eux et pour vous. [12]

 

Dans le premier verset, on lit Nous pourvoyons pour vous et pour eux et, dans le second, Nous pourvoyons pour eux et pour vous. Quelle est la différence ?

 

Dans le premier verset, la pauvreté est déjà installée. C’est pourquoi Dieu - Exalté soit-Il - dit "Nous pourvoyons pour vous et pour eux". Lorsque la pauvreté se fait sentir, l’individu est d’abord soucieux de sa propre subsistance. Il cherche sa nourriture en premier lieu, puis il songe à la nourriture de ses futurs enfants. Son souci à ce stade c’est de pourvoir pour lui-même et pour son épouse. C’est pourquoi Dieu le rassure d’abord quant à sa subsistance propre, qui constitue son premier souci, puis Il le rassure quant à la subsistance de ses enfants à venir comme pour dire : "Tu es pauvre et ne possèdes rien. Tu crains d’avoir des enfants car tu n’as pas les moyens de les nourrir. C’est Moi qui pourvoie pour toi et pour eux. J’ai prévu ta subsistance et Je leur ai prévu une subsistance qui ne retranchera rien à ton lot."

 

"Et ne tuez point vos enfants par crainte de pauvreté, Nous pourvoyons pour eux et pour vous." Dans ce contexte, l’individu ne connait pas de souci quant à sa propre subsistance et ne souffre pas de la pauvreté. Il a suffisamment de ressources mais il craint d’être sujet à la pauvreté par la venue au monde d’un enfant. Il redoute que cet enfant ponctionne une partie de sa subsistance qui ne suffira plus désormais à ses besoins ni à ceux de son enfant. L’individu peut donc être réticent à faire des enfants qui réduiront d’autant sa propre subsistance. Dieu lui répond : "Nous pourvoyons pour eux et pour vous."

 

Dans le premier verset, l’individu se soucie d’abord pour lui-même et Dieu - Exalté soit-Il - le rassure : "Nous pourvoyons pour vous." Puis, lorsque dans le contexte du second verset, la subsistance est disponible pour l’individu mais la venue de futurs enfants fait planer le spectre de la pauvreté, Dieu le rassure en rappelant que les enfants ne vont point amoindrir sa subsistance : "Nous pourvoyons pour eux et pour vous."

 

Le changement de la formulation s’imposait donc pour traduire des situations différentes.


L’inéquité envers soi et la malfaisance

 

Prenons un autre exemple. Considérons les nobles versets "et pour ceux qui, s’ils ont commis quelque turpitude ou causé quelque tort à eux-mêmes" [13] et "Quiconque agit mal ou fait du tort à lui-même" [14].

 

Certains s’interrogent : commettre une turpitude et mal agir, cela ne constitue-t-il pas un tort infligé à soi-même ? Il s’agirait de la même chose puisque celui qui cause du tort à lui-même la conduit au châtiment et celui qui commet quelque turpitude la conduit au châtiment également. Certains vont jusqu’à affirmer que la conjonction de coordination ici n’est pas obligatoire.

 

Je leur rétorque que la précision de l’énoncé procède de la précision de son auteur. Dieu - Exalté soit-Il - nous montre l’inimitabilité du Coran et nous informe qu’il y a une différence entre celui qui commet quelque forfait ou turpitude et celui qui cause du tort à lui-même. Quelle est-elle ?

 

Celui qui commet un forfait ou quelque turpitude le fait pour assouvir un désir immédiat. Son âme est faible ; elle cède à ses passions et se laisse éblouir par le lustre de la vie ici-bas. Un individu qui boit du vin savoure ses délices. Un individu qui fornique assouvit un désir immédiat. Celui qui vole le bien d’autrui assouvit un désir immédiat en profitant de ce bien. Tel est l’homme qui agit mal ou commet quelque turpitude.

 

En revanche, celui qui cause quelque préjudice à lui-même appartient à un autre type d’individus. Il commet un péché mais n’en profite pas. Il n’en récolte rien ici-bas ni dans l’au-delà. De ce point de vue, il porte préjudice à lui-même puisqu’à court terme, il ne récolte aucun profit et, dans l’au-delà, il n’affranchit pas sa peau du châtiment.

 

Certains vendent leur religion pour leur vie ici-bas. D’autres la vendent pour l’ici-bas d’autrui. Le premier cherche le profit à court terme. Le second a perdu sur les deux tableaux et c’est celui-là qui porte préjudice à lui-même. De quelle manière peut-on porter préjudice à soi-même ? En se prêtant à un faux témoignage afin de nuire à autrui, on ne gagne rien pour soi-même : on commet un péché sans en récolter le moindre bénéfice terrestre. En empochant un salaire pour ce faux témoignage, on réalise un profit terrestre. Celui qui porte préjudice à lui-même est celui qui commet le péché pour satisfaire les autres. Nombreux sont ceux qui appartiennent à cette catégorie. On peut dire celui qui cause du tort à lui-même est un individu qui fait en sorte d’aller en Enfer, commet des péchés, et en même temps n’en profite en aucune manière. Il est injuste avec lui-même dans l’ici-bas et dans l’au-delà. Là réside la différence entre les deux expressions.


Une lumière et des ténèbres

 

Une autre expression coranique mériterait qu’on s’y attarde un peu. Nous constatons que Dieu - Exalté soit-Il - emploie toujours dans le Coran le terme lumière au singulier et use aussi bien du pluriel que du singulier pour le vocable "ténèbre". Le pluriel n’est jamais employé pour la lumière. On y évoque une lumière et une ténèbre. On y évoque aussi une lumière et des ténèbres. Dieu - Exalté soit-Il - sort les gens "des ténèbres vers la lumière" et non pas vers les lumières. Pourquoi ?

 

Dans l’ici-bas, il y a de nombreuses ténèbres mais il n’y a qu’une seule lumière, la lumière de Dieu - Exalté soit-Il -, la lumière de la vérité. Aussi Dieu - Exalté soit-Il - n’emploie-t-il que le singulier pour désigner la lumière car la lumière est celle de la vérité et il n’y en a point d’autre.

 

Chaque âme est en proie à une passion, laquelle est une ténèbre. La ténèbre d’untel diffère de celle de tel autre. L’homme est souvent l’esclave de ses passions. La divergence des passions est à l’origine des conflits dans l’ici-bas, elle provoque meurtres, vols, agressions et toutes sortes de conflits que l’on connait partout.

 

Ces ténèbres, chacun selon ses passions, vont donner à chacun un discours différent. Les visées des uns sont différentes de celles des autres. Chacun dit ce qui semble réaliser ses propres intérêts. Les uns sont communistes, d’autres sont capitalistes et d’autres enfin sont socialistes. Il n’y a là que des slogans qui tiennent sur une passion que l’individu pense être en mesure de réaliser : avoir la suprématie sur terre, pouvoir disposer librement des biens et des choses sacrées, humilier les gens en vertu du rang que Dieu lui a donné, de sa fortune ou de son pouvoir.

 

Il s’agit donc de ténèbres multiples, selon les passions de chacun. Cependant, Dieu - Exalté et Glorifié soit-Il - est le Vrai. Il a créé la lumière afin de permettre à l’être humain de vivre sereinement. Il a tracé le chemin à suivre dans le Noble Coran. Tous nos tâtonnements loin de ce chemin sont autant de ténèbres. Par conséquent, Dieu - Exalté soit-Il - nous sort de ténèbres multiples et nous guide vers une lumière unique, la sienne, vers Sa voie, Lui le Vrai.

 

Si nous nous accordons sur le Bien, aucun différend ne nous séparera. Jamais on ne trouvera de divergence entre des gens dont le coeur est empli de Bien, qui visent le Bien, et qui oeuvrent pour le Bien. Les conflits et le malheur ne se fondent que sur l’assouvissement des passions dans ce bas monde. La raison pour laquelle Dieu - Exalté soit-Il - emploie le pluriel pour les ténèbres et le singulier pour la lumière est-elle désormais comprise ?

 

Voilà quelques exemples très simples de l’inimitabilité et de l’extrême précision qui caractérisent le Coran. Tout changement dans la formulation exprime nécessairement un sens nouveau. Il n’y a là aucune place pour la redondance, ni pour l’imprécision. Chaque mot est à sa place et l’énoncé est d’une extrême éloquence.

 

Cela n’a pas empêché certains orientalistes visant à détourner les gens de la voie de Dieu, ou étudiant le Noble Coran pour mieux le combattre, d’affirmer que le Coran se contredit, ajoutant que cela est tout à fait normal puisque, selon leurs dires, l’auteur du Coran n’est autre que Mohammad - paix sur lui - qui, comme tout être humain, était sujet à l’oubli et aux contradictions au fil du temps. Les voilà donc prêtant des contradictions au Noble Coran, contradictions dont je traiterai dans le prochain chapitre de ce livre.

 

Traduit et adapté de l’arabe, Mu`jizat Al-Qur’ân (Le miracle du Coran) de Sheikh Mohammad Mitwallî Ash-Sha`râwî, Kitâb Al-Yawm, 2ème édition, 1981, Le Caire - Egypte. ISBN 977-7327-21-8.

 

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[1] harf désigne en arabe une lettre mais aussi une préposition. Souvent en arabe les prépositions se réduisent à une lettre.
[2] Sourate 27, An-Naml, Les fourmis, verset 69.
[3] Sourate 31, Luqmân, verset 17.
[4] Sourate 42, Ash-Shûrâ, La consultation, verset43.
[5] Sourate 9, At-Tawbah, Le repentir, verset 28.
[6] Sourate 26, Ash-Shu`arâ’, Les poètes, versets 77 et 78.
[7] Sourate 26, Ash-Shu`arâ’, Les poètes, verset 79.
[8] Sourate 26, Ash-Shu`arâ’, Les poètes, verset 80.
[9] Sourate 26, Ash-Shu`arâ’, Les poètes, verset 81.
[10] La jâhiliyyah, "temps de l’ignorance", renvoie à l’ère anté-islamique.
[11] Sourate 6, Al-An`âm, Les bestiaux, verset 151.
[12] Sourate 17, Al-Isrâ’, Le voyage nocturne, verset 31.
[13] Sourate 3, Al `Imrân, verset 135.
[14] Sourate 4, An-Nisâ’, Les femmes, verset 110.