L'Ismaïlisme
E'crit par Admin
Jeudi, 10 Décembre 2009 11:18
L'ismaïlisme est une secte religieuse dérivée de la religion chiite. L'apparition de cette secte est due aux divergences de vue qui se sont produites à propos du transfert de l'imamat après le décès du vénéré Imam Jaafar al-Sadeq _béni soit-il_.
D'après les Ismaélites, l'imamat aurait été transféré à Ismaël, fils cadet de l'Imam Jaafar al-Sadeq et frère de l'Imam Mussa al-Kazem. Mais Ismaël décéda avant son père, et les Ismaélites croient que l'imamat aurait dû être transféré au fils d'Ismaël, Mohammad qui fut le petit-fils du vénéré Imam Jaafar al-Sadeq.
Selon la théologie ismaélite, l'histoire de l'humanité se divise en plusieurs périodes. Chaque période débute avec l'apparition d'un prophète législateur, appelé "Nâteq" (littéralement : parlant) selon la terminologie ismaélite, et d'un imam surnommé "Assâs" (littéralement : principe). Les prophètes législateurs étaient au nombre de sept, et après chacun d'eux sont apparus sept imams. Chaque période prophétique dure mille ans. A l'issue de chaque période, apparaît un nouveau prophète législateur qui apporte une nouvelle doctrine religieuse pour annuler la précédente. Les imams sont les substituts et les héritiers des prophètes législateurs et leur mission consiste à commenter et interpréter la charia de la religion, car ils ont la science de l'interprétation (Ta'wil).
Selon les théologiens ismaélites, l'humanité se répartit en deux groupes de gens : il y a d'abord une élite distinguée par le talent ésotérique qui permet de comprendre et d'interpréter les significations cachées et profondes de la religion et de la charia (Bâten), selon le degré de connaissance de chaque individu. Il y a ensuite la majorité des gens qui ne sont capables que de comprendre les significations apparentes de la religion et des principes de la charia, en s'appuyant sur les facultés exotériques (Zâher). En ce qui concerne l'organisation religieuse des Ismaélites, il faut dire que cette secte repose sur une hiérarchisation spirituelle qui s'organise du bas vers le haut de la façon suivante : la personne nouvellement entrée dans le groupe (Mustajib), la personne autorisée (Ma'zûn), le missionnaire ismaélite (Dâ'i), l'argument (Hudjat), l'intermédiaire (Bâb) et l'Imam.
Les imams sont apparents ou cachés selon les impératifs de la période de leur imamat. Selon les théologiens ismaélites, pendant la période de l'occultation des imams cachés, se sont les missionnaires qui doivent se charger de la direction religieuse et spirituelle. Les Ismaélites croient que pendant la période d'occultation de l'imam caché, seul les intermédiaires et les élites sont capables de rencontrer leur imam. Les Ismaélites sont d'avis que la période d'occultation a commencé du vivant de Mohammad Ibn Ismaïl et durera jusqu'au soulèvement d'Obeidullah al-Mahdi à Kairouan. Les missionnaires ismaélites les plus célèbres de cette époque étaient Abou Abdallah Hassan Ibn Ahmad Zakarouyeh (alias Abou Abdallah le Chiite) et Qaddâh, qui étaient l'un comme l'autre de l'origine iranienne.
En 297 de l'Hégire, Abou Abdallah le Chiite a réussi à propager, sur une vaste échelle, le message de l'ismaïlisme parmi les tribus Katamah (dans le Nord de l'Afrique). Il a libéré Obeidullah al-Mahdi qui était emprisonné à Sajalmasseh. Obeidullah al-Mahdi a été désigné ensuite en tant que leader principal de l'appel ismaélite. Obeidullah al-Mahdi s'est installé à Kairouan est il s'est proclamé calife et imam des Musulmans. A partir de cette période, les Ismaélites sont devenus célèbres en tant que Fatimides, car ils se proclamaient de la vénérée fille du Prophète de l'Islam, Fatemeh _ bénie soit-elle_. Pendant cette période historique, le message des Ismaélites s'est propagé très rapidement dans différentes régions des terres islamiques notamment dans le Nord de l'Afrique, le Yémen, Bahreïn, la Syrie, la Palestine et l'Iran.
Le califat chiite ismaélite est devenu très vite un adversaire puissant du califat des Abbassides à Bagdad. Les Ismaélites dominaient également la Méditerranée qui n'était plus une zone sûre pour les Européens, étant donné que les Fatimides avaient même pillé le port de Marseille dans le sud de la France, après avoir conquit la ville de Gène dans le nord-ouest de l'Italie. A l'époque d'al-Mu'eziddinullah (314-365 de l'Hégire), Juhar, originaire de l'île de Sicile a réussi à conquérir l'Egypte pour les Ismaélites et mettre ainsi fin au pouvoir de la dynastie des Ikhchidites. C'était pendant cette même époque que les Ismaélites ont fondé l'université Al-Azhar dont le nom est tiré de celui de la vénéré fille du Prophète, Fatemeh Zahra _bénis soit-elle_.
Sous le cinquième calife ismaélite, Aziz (365-385), le pouvoir des Fatimides a atteint son apogée. Les Ismaélites ont considérablement développé leur puissance et leur influence sur une très vaste région qui s'étendait de l'Océan atlantique jusqu'à la mer Rouge, le Yémen, la Mecque et Damas. Parfois les Imams des mosquées à Mossoul, dans le nord de l'Irak actuel, faisaient même leurs sermons au nom du calife fatimide, ce qui était considéré à l'époque comme une humiliation pour les califes abbassides de Bagdad. Depuis le début du mouvement ismaélite, les partisans de cette secte étaient présents en Iran. Ils ont réussi surtout à propager le message de la secte à Deylaman, Alamut, Qahestan, Dâmqân et Sistn (il faut savoir que ces régions avaient déjà connu les traditions religieuses très anciennes, ainsi que les traditions des Chiites mais aussi des Kharijites). Parmi les missionnaires ismaélites les plus célèbres de cette période, nous pouvons mentionner le nom d'Abou Hatam Razi (décédé en 322 de l'Hégire), qui vivait dans la région de Deylaman, Abdulmalek Kowkabi, qui vivait à Gerdkouh près de Dâmqân, Ishâq (Abou Yaqoub Sagzi) à Ray, et enfin Hossein Ibn Marvroudi dans la région de Khorasan.
Dans la région de Deylaman, Abou Hatam Zari a réussi à appeler d'importantes personnalités à se convertir à la religion ismaélite telle que Asfar Chirouyeh, Mardavij Ziyari, Toussof Ibn Alsadj. Dans la région du Khorasan, Mohammad Nakhchabi a poursuivi la mission de Marvroudi, et il est arrivé à convaincre la plupart des personnalités importantes de la cour des Samanides à se convertir. Mais les commandants militaires des Samanides qui étaient pour la plupart d'origine turque, se sont révoltés contre les Ismaélites, qui ont massacré un grand nombre des leurs notamment Mohammad Nakhchabi. Abou Yaqoub Sagzi a été assassiné par Khalaf Ibn Ahmad Saffari (décédé en 399 de l'Hégire).
Après la dynastie des Samanides, les Ismaélites ont dû subir le harcèlement et le massacre que leur infligeait Sultan Mahmoud, roi de la dynastie des Ghaznavides. Dans la foulée, de nombreux Ismaélites de Taleqân au Khorasan qui soutenaient Abou Ali Simdjouri face aux exactions de Sultan Mahmoud ont été assassinés. Dans le même temps, les Ismaélites de Multân en Inde ont été exilés. Cependant, ces massacres, poursuites et harcèlements n'ont pas mis fin aux activités des missionnaires ardents ismaélites. En effet, ces derniers ont continué leurs activités de missionnaires tout au long du IVe et Ve siècles de l'Hégire.
Au Ve siècle de l'Hégire, Nasser Khosrô Qobâdiâni était le plus célèbre missionnaire ismaélite qui a commencé ses activités au début de la prise du pouvoir par la dynastie des Seljukides. Suite aux activités de Nasser Khosrô au Mazandéran et au Khorasan, une nouvelle secte ismaélite appelée "Nasseriyeh" est apparue dans ces régions, portant le nom de son fondateur.
Pendant cette même période, plusieurs autres missionnaires fatimides propageaient leurs croyances dans la région de Jebal. Les plus célèbres d'entre eux étaient Abdelmalek Atash et son fils Ahmad. Avant d'être arrêté, torturé et exécuté, Ahmad Atash avait conseillé à Hassan Ibn Ali Ibn Mohammad Sabah de se rendre en Egypte. Hassan Sabah s'était déjà converti à l'ismaïlisme par Amir Zarrab et Bou Nadj Serradj. Hassan Sabah est arrivé en Egypte en 465 de l'Hégire, cependant il n'a pas réussi à rencontrer le huitième calife fatimide Al-Mustansir Billâh. Après un séjour d'un an et demi, Hassan Sabah est revenu en Iran en 473 de l'Hégire.
Pendant une période de dix ans, Hassan Sabah a cherché inlassablement un siège sûr et solide dans les régions du nord, de l'est, de l'ouest et du centre de l'Iran. Finalement, en 483 de l'Hégire, à l'aide de Qâzi Hossein Qâyeni (ancien gouverneur de Tarchiz) et des Ismaélites de Deylaman, Hassan Sabah a trouvé un endroit idéal. Ils ont réussi à s'emparer de la forteresse d'Alamut. Cette forteresse avait été fondée en 246 de l'Hégire par l'un des gouverneurs locaux de Deylaman. Hassan Sabah a fait réparer et fortifier la forteresse d'Alamut pour la transformer en un siège important de l'ismaïlisme. En 484 de l'Hégire, Hassan Sabah a décidé d'envoyer Qâzi Hossein Qâyeni à Qahestan et au Khorasan en tant que son émissaire pour y propager les pensées et les croyances ismaélites. A l'aide des Ismaélites de Qahestan, ils ont réussi à conquérir la forteresse ancienne de Darreh qui se situait à 150 Km au sud-est de Birdjand, non loin de la région du Sistan.
La prise de la forteresse d'Alamut à Deylam et de la forteresse de Darreh à Qahestan a inquiété le gouvernement des Seljukides qui craignaient la montée du pouvoir des Ismaélites. Les Seljukides ont décidé alors de réagir très fortement contre les Ismaélites. Les troupes des Seljukides dirigées par Amir Yourountash à Alamut et Qezel Sarouq et secondées par leurs alliés venant du Sistan dirigés par Baha al-Doleh ont mené plusieurs attaques contre les positions des Ismaélites. Mais les Ismaélites ont résisté très fortement aux assauts des troupes des Seljukides. Dans le même temps, l'empereur des Seljukides Malik Chah est mort et ses troupes ont abandonné la poursuite de leurs attaques contre les positions des Ismaélites. Par ailleurs, l'ismaélite Abou Taher Arani Detlami a profité de cette occasion pour assassiner le vieux vizir de Malik Chah, le célèbre Nizam al-Mulk.
Les Ismaélites ont profité de la mort de l'empereur et de son grand vizir pour s'emparer de plusieurs autres forteresses. En 486 de l'Hégire, après la mort de Malik Chah, l'empire des Seljukides a été divisé entre ses fils. Dans le même temps, les Ismaélites ont connu une nouvelle rupture à la mort du calife fatimide Al-Mustansir Billâh, certains Ismaélites ont donné leur allégeance à son fils aîné al-Mustapha aldinnallah alias Nizar, tandis que les autres sont restés fidèles à son frère cadet al-Mostali Billâh Ahmad. Les Ismaélites ont subi ainsi une profonde divergence qui les a divisés en deux groupes : les Nizârite et les Mostalites. Les Ismaélites de l'Iran et de la Syrie sont devenus officiellement adeptes de Nizâr, tandis que les Ismaélites de l'Egypte et du Maghreb soutenaient l'imamat de Mostali. Une fois indépendant des Fatimides de l'Egypte, les Ismaélites de l'Iran ont donné un nouvel élan à la propagation des pensées et des croyances nizârites.
En 489 de l'Hégire, les Nizârites ont réussi à s'emparer de Lamsar, l'une des forteresses d'Alamut. La corruption au sein du gouvernement des Seljukides était telle que la plupart des gens voyaient dans le mouvement des Ismaélites d'Alamut et de Qahestan, une force libératrice, de sorte que Monawar Simdjouri a décidé de livrer aux Ismaélites la forteresse de Messinan à Tabas en raison des oppressions que les Seljukides avaient infligés aux habitants de cette région. Dans le même temps, Amid Massoud Zourabadi, gouverneur de la région Tarchiz a demandé l'aide aux Ismaélites face à la tyrannie des Seljukides. Plus tard, les enfants de Alaeddin Massoud Zourabadi ont essayé de rétablir la tradition des sermons au nom du calife abbasside de Bagdad, mais ils n'ont pas réussi à convaincre les habitants de la région, et l'orateur officiel de Tarchiz a été assassiné par les Ismaélites et leurs partisans.
Les Ismaélites ont envahi toute la région de Qahestan : de Darreh au sud jusqu'à Tarchiz au nord, et de Tabas Messinan à l'est jusqu'à Tabas Gilaki à l'ouest. Les Ismaélites de Tabas Gilaki se sont réunis derrière l'émir d'une grande famille ancienne ismaélite pour intervenir dans le conflit de succession entre les deux fils de Malik Chah, Kiaraq et Sanjar, pour soutenir le premier contre le second. Lorsque les Ismaélites ont consolidé leur emprise à Alamut, à Qahestan et dans d'autres régions, ils se sont préparés au fur et à mesure à développer leur pouvoir et à prendre les régions voisines. En 493 de l'Hégire, Muzaffar Mostufi Isfahani, un ancien soutien des Ismaélites, a pris la forteresse de Gerdkouh à 15 Km au nord de Dâmqân. Cette année-là, Ahmad Ibn Abdelmalek Attash a envahi la forteresse de Chah à Ispahan.
Par ailleurs, les Ismaélites de Qomès qui avaient envahi les trois forteresses de Lajvardi, Ostonavand et Ardahan, sur la route principale reliant Ray au Khorasan se sont mis à banditisme et pillage des caravanes qui passaient par cette route.
Les attaques successives des troupes des Seljukides depuis Ray et Al-Bavand au Tabarestan n'étaient pas assez puissantes pour mettre fin aux activités des Ismaélites dans cette région, car ces derniers ont continué progressivement d'avancer vers les régions voisines. Vers la fin du Ve siècle de l'Hégire, les Ismaélites de Qahestan sont arrivés aux villages situés dans le sud de la région de Beyhaq où ils ont envahi les forteresses du sud de Qomès. Cela leur a permis de compléter leur chaîne de forteresse le long de la route principale reliant Ray au Khorasan. Dans le même temps, les Ismaélites ont conquis plusieurs autres forteresses dans la région du Khûzistân, à Ardjan et à Chamankouh d'Abhar.
Les Ismaélites réussissaient à recruter la plupart de leurs partisans parmi les gens pauvres et les petits artisans des villes ou des pauvres exilés des milieux ruraux. Les Ikhwan al-Safa (littéralement "Les frères de la pureté"), les précurseurs des Ismaélites, avaient déjà réussi à organiser et à structurer les petits artisans citadins, mais les Ismaélites ont réussi à renforcer les motivations de ces derniers à adhérer aux organisations ismaélites. Comme nous l'indiquent les ouvrages des grands historiens, savants et hommes littéraires de l'époque (comme Ghazali et Sanaï), les petits gens et surtout les habitants des milieux ruraux, à cause de leur mauvaise situation économique, avaient une forte tendance à adhérer à l'ismaïlisme. Les Ismaélites sont devenus si puissants qu'ils ont même réussi à s'infiltrer dans la chambre de l'empereur des Seljukides, Sultan Sanjar et d'enfoncer un poignard dans son lit pour le menacer et lui faire peur. Il est à noter que pendant cette période, les Ismaélites, surtout les adeptes de Hassan Sabah, avaient une grande réputation de dévotion et de sacrifice pour leurs pensées et leurs coreligionnaires. Les domaines dominés par les Ismaélites à Qahestan étaient beaucoup plus vastes que leurs domaines à Roudbar. A Qahestan, les Ismaélites avaient un leader unique surnommé plus tard "Mohtasham". Cependant, à cette époque-là, les forteresses des Ismaélites se soumettaient toutes, malgré leur autonomie, à la souveraineté et à l'autorité de la forteresse d'Alamut.
Vers la fin de l'an 518 de l'Hégire, avant sa mort, Hassan Sabah a désigné Kiabozorg Omid Roudbari comme son successeur, et il lui a demandé de consulter toujours les grands leaders ismaélites pour ses affaires. La mort de Hassan Sabah a encouragé les ennemis des Ismaélites à attaquer les forteresses d'Alamut et de Qahestan. Les troupes des Seljukides et de leurs alliés au Tabarestan et au Sistan ont attaqué les positions des Ismaélites et ils ont massacré leurs partisans de la plupart des villes. Cependant, Kiabozorg Omid, le nouveau chef des Ismaélites d'Alamut, a réussi à repousser les ennemis. Très vite, les Ismaélites nizârites ont envahi les forteresses de Baniyas, Qedmus et Messiyaf en Syrie. Leurs partisans ont assassiné Abou Hashem Zyedi et ont étouffé la révolte des Chiites zaydites dans la région de Deylam. Les Ismaélites ont envahi les forteresses de Takamin, Merkalim et Jakel dans la région de Deylam. Ils ont procédé à une série d'assassinats politiques dont l'une des victimes était le calife abbasside Al-Mustarshad. Kiabozorg Omid est mort en 521 de l'Hégire. Son fils Mohammad lui a succédé et il a poursuivi la guerre contre les Seljukides. Une très violente guerre s'est déclenchée entre les Ismaélites de Roudbar et d'Alamut d'une part et les troupes des Seljukides, dirigées par le gouverneur de Ray, Ali Ibn Shahriyar. Ces troupes ont attaqué à plusieurs reprises la région de Roudbar et la forteresse d'Alamut où elles ont fait construire des minarets avec les têtes coupées de leurs victimes. A Qahestan, les frères du Sultan Sanjar ont détruit presque tous les villages. En revanche, les Ismaélites ont assassiné le gouverneur de Ray et son fils.
Les historiens de l'époque ont fait l'éloge de Mohammad pour son honnêteté et sa clémence envers les prisonniers de guerre. Il est mort en 557 de l'Hégire. Son fils Hassan lui a succédé à la tête du mouvement ismaélite. Selon certaines sources, Hassan serait en réalité un petit-fils de l'imam ismaélite Nizar al-Mustansar qui vivait chez Mohammad qui lui a transféré l'imamat des Ismaélites. Pendant les dernières années du leadership de Mohammad Kiabozorg à la tête mouvement ismaélite, un grand mouvement est apparu parmi les jeunes pour retourner à la simplicité de la vie de l'époque de Hassan Sabah et un renouveau des valeurs ismaélites d'antan. La plupart de ces jeunes, qui avaient adhéré aux pensées gnostiques, estimaient qu'il fallait permettre à ceux qui n'avaient pas réussi à comprendre les significations profondes de la charia, de s'émanciper de toutes les contraintes qui les obligeaient à respecter l'apparence de la charia. Mohammad Kiabozorg a réprimé ce mouvement, mais après sa mort, un grand nombre d'exilés ismaélites sont rentrés à la forteresse d'Alamut, et deux ans plus tard, c'est-à-dire au mois de ramadan de l'an 559 de l'Hégire, ils ont organisé, selon les traditions ismaélites, la "fête de la résurrection". Cette fête était une occasion pour que les dirigeants de ce mouvement donnent l'ordre de la levée des restrictions de la charia pour les fidèles ismaélites.
Cependant, cette démarche a créé de très grands problèmes pour Hassan, car un grand nombre de ceux qui croyaient à la nécessité du respect de la charia ont immigré. Un an et demi plus tard, Hassan a été assassiné par le frère de son épouse, partisan de la charia.
Après lui, son fils Mohammad qui était un homme bien éduqué et qui avait de vastes connaissances religieuses et philosophiques, a pris le pouvoir. Il était contemporain du célèbre théologien l'Imam Khazr Razi.
Les Ismaélites ont envoyé l'un de leurs hommes auprès de l'Imam Fakhr Razi pour le convaincre à adhérer au mouvement ismaélite. Après la rencontre avec le représentant des Ismaélites, les relations entre l'Imam Fakhr Razi et les Ismaélites se sont considérablement améliorées. Selon la légende, pour expliquer son changement d'attitude, l'Imam Fakhr Razi aurait dit qu'il avait vu "l'argument solide" des Ismaélites, en faisant allusion au poignard avec lequel l'envoyé des Ismaélites l'avait menacé. Pendant cette période, les troupes des Seljukides ont poursuivi leurs attaques contre les Ismaélites. Ces derniers ont construit une forteresse devant la ville de Ghazvin pour menacer de plus en plus les positions des Seljukides dans cette ville. Dans le même temps, les Ismaélites nizârites ont profité des combats menés par Saladin contre les Croisés, pour renforcer leurs propres positions. Vers la fin du règne de Mohammad (à partir de 586 de l'Hégire), les Ghûrides qui voulaient supplanter le pouvoir des Seljukides dans la région du Khorasan, ont attaqué à plusieurs reprises les positions des Ismaélites à Qahestan qu'ils ont ruiné très violemment. Dans le nord et au centre de l'Iran, la dynastie des Kharazmchah s'est soulevée contre les Seljukides, au nom de la défense du peuple. Cependant, les Ismaélites faisaient toujours peur, en raison de leur recours très systématique à l'assassinat contre leurs opposants. L'assassinat le plus important qu'ils ont commis à cette période était celui planifié contre Mohammad Ghezel Arsalan Ildgaz, pour se venger des attaques qu'il avait menées contre les Ismaélites. Trois Ismaélites de Qahestan l'ont assassiné en 587 de l'Hégire près de la ville de Hamadan.
Après la mort de Mohammad en 607 de l'Hégire, son fils Jalaleddin Hassan, alias "reconverti à l'Islam" a pris le pouvoir à la tête du mouvement ismaélite. Sous son règne, l'ismaïlisme a connu l'arrêt de son idéalisme. Une nouvelle forme d'aristocratie a remplacé le mode de vie simple d'antan. En effet, Jalaleddin Hassan préférait bénéficier des acquis du mouvement et coexister en paix aux côtés des voisins.
Après lui, ses successeurs ont renoncé au fur et à mesure à leurs croyances sectaires, et ont fait part de ce rononcement au calife abbasside de Nagdad al-Nassereddinullah. Les califes et les rois qui n'avaient jamais réussi à vaincre les Ismaélites par la force, ont accueilli très favorablement ce changement de cap et la politique de l'ouverture des Ismaélites, et ont accepté de reconnaître leur droit de souveraineté dans leurs territoires. Par conséquent, lorsque la mère de Hassan se rendait au pèlerinage de la Mecque, a reçu un accueil officiel à Bagdad. A la forteresse d'Alamut, Hassan a autorisé les oulémas sunnites les plus durs à inspecter la bibliothèque des Ismaélites et de détruire les livres qu'ils considéreraient comme étant dangereux ou indésirables. Les réformes et les changements que Hassan introduisait dans tous les domaines n'ont pas heurté à de sérieux obstacles ou oppositions de la part des fidèles ismaélites, car, en réalité, selon les enseignements ismaélites, les fidèles sont tenus à respecter entièrement toutes les décisions de leur imam dans tous les domaines. Dans les régions occidentales de l'Iran, Hassan était considéré comme l'axe principal du règlement de tous les problèmes, et il a joué un rôle de premier ordre dans le règlement des conflits régionaux. Après la défaite du gouverneur ouzbek Mogoli, Hassan s'est emparé des villes d'Abhar et de Zanjan.
Après la mort de Hassan en 618 de l'Hégire, Mohammad III, alias Alaeddin Mohammad est devenu l'imam des Ismaélites de la forteresse d'Alamut. Son règne a coïncidé avec l'invasion mongole et l'effondrement de la dynastie des Kharazmchah. Après avoir saccagé les villes et les villages de la région du Khorasan, les troupes mongoles s'en sont pris aux régions sous contrôle des Ismaélites notamment à Qahestan. Les Ismaélites ont eu la sagesse de faire la paix avec les Mongols. Leur domaine est ainsi devenu une terre sûre pour les réfugiés qui avaient fuit les Mongols. L'un de ces réfugiés était l'illustre savant Khadjeh Nassireddin Toussi qui a trouvé le calme à Qahestan, pour y rédiger de nombreux ouvrages scientifiques dont son grand ouvrage sur l'Ethique et un essai qu'il a dédié à Nassereddin, l'imam ismaélite de Qahestan. Les imams ismaélites de Qahestan surtout Chhabeddin Abou Mansour était très généreux envers les réfugiés venus d'ailleurs, de sorte que les Ismaélites d'Alamut les accusaient parfois de gaspiller les moyens dont ils disposaient.
Dans le conflit qui s'était déclenché entre le califat abbasside de Bagdad et la dynastie des Kharazmchah, les Ismaélites de la forteresse d'Alamut soutenait le califat abbasside de Bagdad. Dans le même temps, les Ismaélites ont profité de la faiblesse des Abbassides pour envahir Dâmqân et plusieurs régions occidentales de l'Iran. Dans le même temps, Alaeddin Mohammad avait envoyé des agents secrets ismaélites s'infiltrer dans les organes soumis au vizir de Jalaleddin Kharazmchah, Charafeddin Fakhreddin Ali. Plus tard, les hommes du vizir ont identifié ces agents secrets et les ont brûlés vifs. Ces derniers criaient "Vive Alaeddin" aux derniers moments de leur vie.
La mort de l'empereur Jalaleddin Kharazmchah a encouragé les Ismaélites à développer leurs activités pour exploiter le désespoir des gens pour les appeler à se convertir à l'ismaïlisme. Cependant, les Ismaélites n'ont pas réussi à réaliser leurs plans pour s'emparer des régions littorales du sud de la mer Caspienne, sans pour autant pouvoir développer l'ismaïlisme en Inde ou en Chine. Encouragé par le juge Chamseddin Ghazvini, l'empereur mongol Hulagu Khan s'est rendu en Iran pour réprimer les Ismaélites. Dans un message adressé au calife abbasside à Bagdad, Alaeddin Mohammad a écrit : "Je suis la première cible des Mongols. S'ils me tuaient, il n'y aura aucun obstacle entre eux et vous." Finalement, Alaeddin a été assassiné. Son propre fils Rokneddin a été accusé d'être impliqué dans cet assassinat.
En 653 de l'Hégire, Rokneddin Khorchah s'est mis à la tête des Ismaélites de la forteresse d'Alamut. Il a envoyé plusieurs émissaires auprès des mongols et des gouverneurs des régions voisines. Mais le khan mongol Hulagu exigeait avec force sa reddition totale et sans condition. Les conseillers de Rokneddin lui ont proposé de se livrer à l'empereur mongol, mais les jeunes ismaélites se disaient prêts à se battre courageusement contre les envahisseurs mongols. Finalement, les chefs ismaélites de Gerdkouh et de Qahestan ont décidé de se rendre aux Mongols, tandis que les Ismaélites réunis dans les forteresses (Gerdkouh, Toun, Tabas Messinan) ont opté pour se battre contre les Mongols. Mais une épidémie de choléra a brisé la résistance des forteresses et les Ismaélites ont été vaincus par les ennemis. Les Mongols ont détruit toutes les forteresses des Ismaélites. Les survivants ont été massacrés et certains d'entre eux ont été exilés.
Après l'invasion mongole, les tentatives des Ismaélites pour reprendre à nouveau en main le contrôle d'Alamut et de Qahestan ont toutes échoué. Leur imam Mohammad Nodowlat n'a jamais réussi à rétablir un gouvernement ismaélite.
A partir de cette période, les Ismaélites se sont résignés à se réfugiées dans le sufisme. Mais plusieurs siècles plus tard, ils sont réapparus à l'époque de la dynastie des Zend et surtout au début de la période de la dynastie des Qadjar.