Prédésigné à l'Imamat par le Texte (le Prophète ayant dit: al-Hassan et al-Hussayn sont deux Imams, qu'ils soient debout ou assis) et désigné par l'Imam 'Alî, sur ordre du Prophète, pour cette même dignité ou autorité, al-Hassan devint après la mort de son père, le deuxième Imam des Musulmans, c'est-à-dire leur plus haute autorité juridico-religieuse, le représentant et le successeur légal du Prophète, et le gardien du Message.
Mu'âwiyeh, fils d'Abou Sufiyân, ou la haine noire des Omayyades envers la Famille du Prophète
Mu'âwiyeh s'était permis de s'opposer à la direction de l'Imam 'Alî puis à celle de l'Imam al-Hassan sous un prétexte fallacieux qui a pu tromper au début certains Musulmans et ébranler la sérénité de beaucoup d'autres, à savoir la recherche et la punition des assassins de 'Othman.
Mais bien entendu ce prétexte sans aucun fondement réel ne résistera pas longtemps à l'examen - bien que trop tard - puisque la suite des événements ne tardera pas à montrer que venger 'Othman était le cadet des soucis de Mu'âwiyeh, animé avant tout par un double sentiment: la haine et l'ambition, une haine noire et irréductible envers la Famille du Prophète et une ambition héréditaire pour le pouvoir.
Mu'âwiyeh prépara son armée à l'invasion de l'Irak et écrivit à ses fonctionnaires pour qu'ils se mettent sur le pied de guerre.
L'Imam al-Hassan s'est affairé de son côté à encourager les Musulmans de Kûfa, capitale du Califat au jihâd contre les rebelles, sitôt qu'il a appris la nouvelle du mouvement de Mu'âwiyeh vers l'Irak.
Il chargea Hojr Ibn 'Adi de mobiliser les gens en vue du combat qui s'annonçait virtuel. Le muezzin appela un jour à une prière en assemblée.
L'Imam al-Hassan monta sur la chaire, et après avoir ouvert son sermon par la louange et le remerciement à Dieu, il dit:
« Dieu a prescrit le Jihâd à Sa créature et l'a appelé "contrainte" ».
Puis il a dit aux croyants (combattants) de patienter, car Dieu est avec ceux qui savent patienter.
« O gens! Vous ne pourrez obtenir ce que vous aimez qu'en sachant patienter devant ce que vous n'aimez pas. J'ai appris que Mu'âwiyeh, ayant su que nous étions sur le point de marcher sur son camp, a pris les devants. Dirigez-vous donc vers votre campement à "Nukhylah" »
Un homme parmi l'assistance, 'Ady Ibn Hâtam, honteux de l'attitude passive des combattants, s'écria:
« Je suis le fils de Hâtam. Gloire à Dieu! Quelle attitude détestable! Pourquoi ne répondez-vous pas à l'appel de votre Imam, le fils de la fille de votre Prophète. Que sont devenus ces beaux parleurs qui se disaient être rompus aux combats lorsqu'ils se trouvaient en sécurité, mais qui fuient comme des lapins lorsque la situation devient sérieuse. Ne craignez-vous donc pas la colère de Dieu! Ni la honte! Ni l'humiliation! ».
Puis se tournant vers l'Imam al-Hassan, il dit, tout décidé:
«….. Me voilà partant pour le campement. Celui qui aimerait faire de même qu'il me rejoigne...»
II sortit de la Mosquée, enfourcha sa monture et se dirigea vers al-Nukhaylah. Il fut ainsi le premier homme mobilisé
Les fidèles suivirent l'Imam al-Hassan du moins sans grand enthousiasme, sinon presque à contra-cur. Sans les efforts de la poignée d'hommes pieux et généreux qu'étaient Qaïs Ibn Sa'ad, 'Ady, Ma'qal Ibn Qaïs al-Riyâhî, Ziyâd Ibn Ca'ça' al-Tem, etc., aucune mobilisation n'aurait été possible.
l'Imam al-Hassan réussit à entraîner derrière lui une armée de plusieurs milliers de combattants, mais une armée hétéroclite, et savait combien sa situation était précaire.
Mu'âwiyeh qui connaissait parfaitement les points faibles de l'armée de l'Imam al-Hassan n'eut aucun scrupule à décider d'en tirer profit par tous les moyens.
Aussi élabora-t-il en même temps qu'il préparait son armée à l'invasion du territoire irakien, un plan de réconciliation par lequel il comptait mettre l'Imam al-Hassan devant un dilemme: ou bien accepter la réconciliation en cédant le Califat à Mu'âwiyeh, ou bien se faire passer pour seul responsable d'une bataille au terme de laquelle Mu'âwiyeh prendrait grand plaisir à anéantir le reste des membres bénis de la Famille du Prophète.
Il comprit que l'Expérience islamique se trouvait à un tournant et qu'on assistait à un changement d'époque et d'état d'esprit, à une rupture entre ce que lui-même incarnait (les exigences du Message) et la disposition présente de la Ummah.
Si combattre la corruption par une corruption équivalente était devenu le seul moyen valable de s'opposer à un agent corrupteur, en l'occurrence, Mu'âwiyeh, c'est que le mal ou la corruption avait atteint le corps même de la Ummah et qu'il était parvenu à un tel stade d'avancement et de ramification qu'il était vain d'essayer de le déraciner dans son stade actuel et qu'il fallait le laisser terminer son cycle et sécréter ses poisons pour que le corps qui le portait s'aperçoive de ses effets nocifs et y réagisse; ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent puisque la Ummah paraissait si intoxiquée par le mal qui la rongeait qu'elle s'en accommodait sans grande peine.
Ayant perdu tout espoir de pouvoir compter sur son armée, l'Imam al-Hassan finit donc par envisager avec un serrement de coeur l'idée de la «Réconciliation», espérant que cet énorme sacrifice lui permettrait de sauvegarder l'essentiel de ce qu'il avait la charge de garder et le devoir de sauver: l'avenir du Message.
Et notre ultime prière est Louanges à ALLAH, le seigneur des mondes.